La Graphothérapie, rééducation de l’écriture.
Thérapie du graphisme par le graphisme.
Bien écrire, quelle importance ? (⬆)
A l’époque de l’ordinateur, du langage SMS est-il encore nécessaire de savoir écrire à la main ? Cette question se posera peut être dans quelques années, mais elle n’est pas encore à l’ordre du jour !
Celui qui aujourd’hui ne "maîtrise" pas son écriture accumule les obstacles : non seulement le constat de ses propres difficultés (gestion des émotions, communication, dimension affective et humaine), mais aussi, la peur du regard de l’autre, la crainte d’être jugé, catalogué, de ne pas être à la hauteur
L’enfant dans ce cas ne peut ni se relire, ni voir ses fautes. S’il écrit trop lentement, il n’a pas le temps de prendre toutes les notes de cours, et il n’a pas non plus le temps de répondre à la totalité des questions lors des devoirs Ses copies sont sales, illisibles et indisposent bon nombre de professeurs, les notes s’en ressentent.
Dans le système scolaire actuel, l’essentiel des évaluations se fait "à l’écrit". Beaucoup de ces enfants perdent confiance en eux, et finissent par se "détacher" du système scolaire qui parfois ne les comprend pas. L’enfant qui n’est pas à l’aise avec l’écrit a peu de chances de faire un parcours scolaire performant, voire d’accéder aux études auxquelles il pourrait prétendre. C’est la spirale infernale de l’échec à l’école. Pourtant, comme la dyslexie, la dysgraphie concerne souvent des enfants au QI élevé, ce sont ceux chez qui l’on observe un décalage entre la maturité intellectuelle et le développement psycho affectif et psychomoteur. Le trouble est d’ailleurs accentué lorsque l’enfant saute une classe (le temps consacré à l’apprentissage de l’écriture n’est pas respecté, loin s’en faut).
Contrairement à un handicap physique qui se voit et qui est reconnu, la dysgraphie est un trouble qui est souvent mal interprété.
On oublie que l’écriture demande un effort considérable à l’enfant dysgraphique, que cet enfant prend lui-même conscience de ses difficultés, qu’il peut être découragé.
Nous nous devons d’être vigilant, attentif et compréhensif à l’égard de ces difficultés, comme nous le serions à l’égard d’un enfant qui marche avec des béquilles mais qui doit, coûte que coûte parcourir du chemin. Nous lui apporterions de l’aide, des encouragements, il ne serait pas jugé sur sa vitesse ou son style, il n’aurait pas d’épreuves sportives imposées parce que nous aurions immédiatement conscience qu’il ne le fait pas exprès. Pourrions nous envisager une tolérance similaire pour des problématiques qui ne sont pas visibles et par conséquent, beaucoup moins évidentes à déceler…
Un soin pour l’écriture ? (⬆)
La graphothérapie peut remédier lorsque :
- L’enfant, l’adolescent ou l’adulte est dysgraphique ou rencontre des difficultés persistantes ou des blocages dans son écriture.
- L’enfant semble en difficulté à l’école ou si les enseignants vous alertent sur son écriture.
Ecrire demande trop d’effort et occasionne de la fatigue ou des douleurs.
- L’écriture ne peut pas se structurer parce que le geste est mal contrôlé.
Il y a un manque de confiance en soi et que l’anxiété survient dès qu’il faut écrire.
- La remédiation est d’abord la réalisation d’un objectif et d’un projet, établis d’un commun accord entre « l’élève » et le thérapeute.
- C’est un dialogue qui permet à la personne de s’exprimer sur ce qu’elle pense de son écriture, en quoi elle lui plaît, qu’est-ce qu’elle lui reproche : confort, esthétique, remarques de l’entourage.
Qu’est ce que la dysgraphie ? (⬆)
Selon la définition d’Ajuriaguerra :
On appelle dysgraphiques les enfants et adolescents qui souffrent de déficience de l’écriture alors qu’aucun déficit neurologique ou intellectuel n’explique cette déficience.
- Le graphisme est sale, trop ou pas assez appuyé, ou tremblé.
- La forme des lettres n’est pas bonne, elle peut être cabossée, mal structurée.
- Le mouvement de l’écriture est mal contrôlé, il peut être saccadé.
- La vitesse est insuffisante ou au contraire trop rapide.
- Les lettres se télescopent, s’enchevêtrent.
- Les mots sont mal cernés, l’espace est mal géré.
- La dysgraphie peut être diagnostiquée au cours d’un bilan graphomoteur.
Ajuriaguerra distingue 5 grands ($)types de dysgraphies($) ayant ces caractéristiques propres :
- Les raides.
- Les mous.
- Les impulsifs.
- Les maladroits.
- Les lents et précis.
Ces catégories sont parfois nettement différenciées mais elles peuvent aussi se recouper.
En résumé, on parle de dysgraphie quand l’écriture est trop lente ou trop rapide, illisible, fatigante, ou encore quand elle est non-conforme aux attentes du scripteur (celui qui a "honte" de son écriture et qui n’ose pas rédiger une lettre, de peur d’être pénalisé par sa "vilaine écriture").
Quand et comment se manifestent les causes de la dysgraphie ? (⬆)
- A l’école primaire, lorsque le rythme de travail s’intensifie et que les notes baissent.
- Au collège ou au lycée, quand les professeurs ne peuvent plus deviner ce qui est écrit et finissent par retirer des points.
- Chez les enfants qui souffrent de ($)dysfonctionnements($) tels que dyslexie, hyperactivité, trouble de déficit d’attention, précocité intellectuelle, dyspraxie.
- Chez les enfants nerveux ou anxieux, ou sujets à des difficultés d’ordre psychologiques, manque de confiance en soi.
D’autres causes souvent diverses peuvent intervenir :
- Manque de maturité au moment de l’apprentissage : l’acquisition de la forme des lettres ne peut se faire.
- Difficultés de position : du corps, de la main, des doigts.
- Difficultés toniques ou handicap physique.
Quels sont les objectifs de la graphothérapie : (⬆)
La remédiation vise le plaisir et l’autonomie. Plaisir de gérer sa propre écriture, en la conduisant comme on conduit une voiture dans laquelle on se sent bien, en sécurité.
Le fait même de proposer à une personne des stratégies pour "réussir" a un effet automatique sur son psychisme. Une écriture qui va mieux engendre une personne qui va mieux.
Etayer la rééducation par le plaisir d’apprendre :
Un principe simple pour développer les compétences, une nécessité pour donner à l’enfant l’envie d’aller plus loin.
L’expérience dans ce domaine montre que dés que l’écriture s’améliore, le comportement de l’enfant change. Son problème est dédramatisé, il est soulagé et reprend confiance en lui. Il écrit de façon plus spontanée, il peut se détacher de la lettre pour accéder à l’idée. N’étant plus en échec, il devient moins agressif ou moins renfermé, il communique mieux. L’image de soi étant meilleure, l’écriture s’améliore encore.
Les objectifs peuvent être :
- Permettre à l’écriture de devenir un outil efficace, une marque personnelle satisfaisante avec un minimum d’effort.
- Prévenir un éventuel échec scolaire en évitant la spirale mauvais résultats, la perte de confiance en soi.
- Retrouver le plaisir d’écrire.
- Reprendre confiance en ses capacités d’expression.
- Aider, rassurer, réconforter sans imposer un nouveau modèle rigide.
Quelles sont les Méthodes : (⬆)
• Le bilan graphomoteur :
Il permet :
- De mieux connaître le contexte ou les circonstances qui peuvent expliquer les troubles de l’écriture.
- De définir, évaluer et diagnostiquer les difficultés.
Il comporte :
- Une anamnèse.
- Une analyse du geste graphique (position du corps, tenue du stylo, pression).
- Une analyse de l’écriture.
- Un test de vitesse.
- Une évaluation des composantes qui caractérisent les difficultés (échelles d’Ajuriaguerra)
A l’issue du bilan, un plan de rééducation personnalisé est proposé, basé sur une écoute attentive et un échange régulier et confiant.
La réussite du projet est largement basée sur la volonté. Il importe dès lors de partir de la personne, de susciter en elle une demande. Le dialogue est primordial.
• Les séances :
Les séances (45 mn environ) ont lieu une fois par semaine ; elles sont basées sur un travail technique et ludique :
- Exercices de détente, relaxation gestuelle.
- Travail en rythme, jeux de précision.
- Exercer l’habileté manuelle avec ou sans instrument scripteur.
- Travail du graphisme à partir des formes pré-scripturales.
• Choix du matériel :
- Exercices sur des supports variés, papiers lignés, quadrillés, unis, plan vertical ou horizontal, plateau de sable, travail avec le doigt, le crayon, le feutre, le pinceau, les encres diluées.
- Entraînement sur des figures favorisant l’amélioration du geste : amplitude, fermeté, continuité, fluidité, contrôle.
- Jeux autour de la lettre, de la syllabe, du mot :
- Jeux de visualisation anticipée : fermer les yeux, voir une forme dans sa tête, comment est elle ?
Jeux autour des canaux de perception : voir la lettre, toucher le sable avec le doigt, sentir le contact du papier sous la main, s’entendre prononcer la lettre.
L’amélioration du graphisme suivra d’elle-même, sans que l’enfant ait l’impression d’avoir travaillé uniquement sur son écriture.
L’apprentissage de l’écriture, quels enjeux ? (⬆)
L’enfant qui découvre progressivement le monde de l’écrit doit apprendre à maîtriser son geste, passer de la forme à la lettre, du symbole au mot, organiser avec logique l’enchaînement des lettres pour donner naissance à l’idée.
L'entrée à l'école d'un enfant est un évènement important, attendu et redouté en même temps, mobilisant la curiosité et la peur. Dès le début, lecture et calcul seront très valorisés, mais l'écriture l'est plus encore.
Apprendre à écrire, c’est apprendre à structurer sa pensée et sa personnalité
L’enfant qui apprend à écrire passe de l’imagination où il est tout puissant, à un monde où une règle stricte s’impose : la calligraphie est un monde de règles précises, qui supposent tout un ensemble d’interdits auxquels l’enfant doit se plier. L’écriture coule la pensée dans un moule qui l’exprime exactement, elle place au bout de la plume le mot le plus juste destiné à fixer précisément l’idée sur le papier. Elle n’a pas la spontanéité du langage oral, elle est beaucoup plus exigeante, plus concise, elle ne tolère pas les libertés que s’accorde le langage parlé. Ecrire, c’est pouvoir exprimer les sons de la parole ou la pensée au moyen d’un système convenu de signes.
• Premier temps: l’acquisition de la forme des lettres.
• Second temps : l’écriture acquiert de l’aisance.
• Troisième temps : l’écriture s’anime d’un rythme personnel.
• Le passage du primaire au secondaire.
L’écriture, un reflet de la personnalité : (⬆)
Ainsi, structurer son écriture, c’est se socialiser, accepter la réalité et les contraintes du monde extérieur, mais aussi apprendre à maîtriser ses émotions, les canaliser.
C’est en cela que l’écriture reflète notre émotivité, notre énergie, notre réactivité. Nous transmettons sur le papier ce que nous ressentons : avec impulsivité ou timidité, avec force ou sensibilité. Par l’écriture manuelle, nous projetons inconsciemment notre personnalité dans notre graphisme, comme le fait le peintre dans sa peinture ou le compositeur dans son œuvre musicale.
L’écriture, à la fois projection, miroir, est quelque chose de soi que l’on donne, et que l’on expose au regard de l’autre, encore faut-il accepter ce regard étranger.
Les troubles de l’écriture sont donc des signes qu’il faut prendre en compte et ne pas ignorer.
• Premier temps: l’acquisition de la forme des lettres.
L’enfant s’applique ce qui entraîne lenteur et tension. L'avenir de l'écriture sera en partie conditionné par l'attitude de compréhension et d'aide ou bien de reproche de l'entourage. A ce stade, la pression est souvent forte, l’enfant appuie ( il peut même y avoir une certaine crispation), traduisant ainsi son anxiété, et souvent, son désir de bien faire.
• Second temps : l’écriture acquiert de l’aisance.
La forme est acquise?. L'écriture s'installe dans une forme assez impersonnelle, très proche du modèle, très neutre, elle "satisfait" tout le monde. Qu'attend on de l'enfant si ce n'est que son graphisme soit précis, régulier, correctement mis en page, soigné et propre, conforme à ce qu'une bonne éducation peut laisser espérer.
• Troisième temps : l’écriture s’anime d’un rythme personnel.
Si l’expérience des deux premiers temps est suffisamment positive, l'enfant va atteindre un stade heureux, son "âge d'or". C’est la période la plus favorable aux acquisitions scolaires et éducatives, temps d'une importante activité motrice, relationnelle, culturelle...
Vient alors le mouvement. En s’animant d’un rythme personnel, l’écriture prend vie. L'application et le plaisir d'écrire atteignent leur point culminant. L'écriture est assez automatisée, assez aisée pour que l'enfant puisse en jouer, puisse se permettre quelques libertés avec le modèle. L e mouvement suppose un désir de se mettre en marche, et une force pour le faire, il témoigne d’un projet et de moyens mis en œuvre pour y parvenir.
Des manifestations d'application et de bonne volonté vont s'allier à de petites reconsidérations personnelles. La peur est surmontée et la vitesse non encore exigée, l'enfant reconsidère le modèle sans le rejeter.
La satisfaction personnelle résulte de cette maîtrise d'un geste, d'un langage, d'une forme, autant que de l'apaisement de l'entourage.
L’écriture sera remise en question deux à trois ans plus tard, soit par les premiers remous de l'adolescence, soit par le passage du primaire au secondaire (souvent par les deux).
• Le passage du primaire au secondaire :
Si jusque là la forme a retenu toute l'attention, mobilisé tout l'effort, voici que l'écriture va être astreinte à la rapidité, nouvelle difficulté. Le développement d'une rapidité contrôlée sera très compromis si la forme n'est pas parfaitement acquise, impliquant:
- Maîtrise de la langue,
- Connaissance des lettres, de leur type de liaison,
- Aisance dans l'inscription
Si l'enfant n'a pas connu le plaisir d'écrire, il réagira mal devant la déformation et ses suites qu'entraînera l'accélération. Son découragement et sa fatigue se traduiront soit dans un relâchement de la forme, soit dans une réaction de défense rigide.
Si, par contre, l'écriture a évolué "normalement", elle va s'adapter à cet impératif, la forme résistera à la rapidité et des aménagements personnels apparaîtront (systèmes de liaison et simplifications), témoins d'une bonne intégration psychomotrice.
Types de dysgraphies : Julian Ajuriaguerra. (⬆)
Julian de Ajuriaguerra, neuropsychiatre et psychanaliste français d'origine espagnole, pionnier de la graphothérapie.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Julian_de_Ajuriaguerra
Le Professeur J. de Ajuriaguerra et son équipe ont mis au point les échelles "E", "EF", "EM" et "D" :
- L’échelle enfant ou "Echelle E" dont se servent tous les graphothérapeutes pour déterminer l’âge graphomoteur d’un enfant de 6 à 12 ans.
- L’échelle D qui permet d’établir le diagnostic de dysgraphie.
- L’échelle E contient 30 caractéristiques enfantines, dites génétiques, c'est-à-dire liées au stade de développement du sujet. Elle se divise en 2 parties :
- L’échelle EF (items de formes) : répertorie les formes et agencements enfantins pour reproduire la calligraphie.
- L’échelle EM (items de mouvement) : répertorie les malformations dues à la motricité.
A partir de l’observation d’une dictée type, le graphothérapeute repère la présence plus ou moins prononcée de chacune de ces caractéristiques, qui sont cotés et évalués selon un coefficient.
L’échelle D regroupe 25 caractéristiques propres à la dysgraphie, décrites sous 3 principales rubriques :
- Mauvaise organisation de la page.
- Maladresse.
- Erreurs de formes et de proportions.
Etayer la rééducation par le plaisir d’apprendre : (⬆)
Pour susciter le plaisir, il faut qu’il y ait de la réussite. Pour qu’il y ait réussite, il faut du plaisir.
Le principe considère que :
Nous exerçons des activités et vivons des expériences particulières en fonction de contingences qui nous sont propres (notre milieu, nos tendances)
Dans ces activités, nous rencontrons des succès et des satisfactions, ou des échecs et des insatisfactions.
Nous en retirons des perceptions particulières de nos aptitudes.
Nos succès suscitent une attente de nouveaux succès.
Nos satisfactions nous conduisent à anticiper de nouvelles satisfactions.
Ces perceptions et ces attentes sont susceptibles de modifier ou d’influencer nos intérêts.
Les enfants n’échappent pas à cette règle bien naturelle qui veut que l’on soit attiré par ce que l’on réussit et découragé par ce que l’on rate et que, parallèlement, on réussisse mieux ce par quoi on est attiré.
A contrario, des tâches trop difficiles ou dépourvues d’attrait ludique ont tout pour rebuter le jeune enfant et le décourager, non seulement de réaliser le travail demandé, mais aussi d’apprendre à écrire, voire, de s’investir dans tout travail scolaire.
La graphothérapie s’appuie sur quelques points clés :
- Proposer à l’enfant ce qu’il est en mesure de réussir.
- Utiliser tout ce qu’il sait faire.
- Ne pas brûler les étapes.
- Maintenir la motivation et encourager.
Dysfonctionnements : Un regard plus juste sur les intelligences différentes. (⬆)
Précocité, dyslexie, dyspraxie, dysgraphie, déficit d’attention, hyperactivité, des particularités invisibles à l’œil nu qui peuvent faire des dégâts dans la scolarité. La société française s’en préoccupe de plus en plus mais il reste des efforts à faire pour améliorer leur dépistage et leur prise en charge.
Derrière ces visages candides ou malicieux, ces tempéraments timides ou impulsifs se cachent des intelligences différentes qui n’aident pas toujours à se fondre dans le moule de l’école.
Les signaux peuvent être très différents d’un enfant à l’autre mais on parle généralement pour eux de "troubles d’apprentissage ".